Il est 7h30 quand le moteur du vieux caïque Nikolas toussote avant de s’éveiller, crachant un nuage de diesel dans l’air encore frais du port d’Antiparos. Autour de moi, des pêcheurs en salopette bleue échangent des regards amusés avec les touristes encore endormis, un café grec serré à la main. Les excursions en bateau depuis Antiparos ne sont pas qu’une affaire de cartes postales : c’est une plongée dans un archipel où chaque île a son caractère, son histoire, et son façon bien à elle de vous faire oublier le temps. En une journée, on peut toucher du doigt l’âme sauvage des Cyclades, entre criques accessibles seulement par la mer et villages où le temps s’est arrêté quelque part dans les années 1960.
Ici, la mer Égée n’est pas qu’un décor. Elle est le fil conducteur d’une culture où les psarades (fêtes des pêcheurs) se mêlent aux légendes de pirates ottomans, et où les femmes tressent encore des paniers en vourgia (fibres de palmier nain) comme leurs grand-mères. Partir en excursion depuis Antiparos, c’est accepter de se laisser surprendre : par un déjeuner de lobster pasta cuisiné à bord avec des langoustes pêchées deux heures plus tôt, par une chapelle byzantine perdue sur un îlot, ou par un berger qui vous offrira un morceau de san michali (fromage local affiné dans du vin) en échange d’une cigarette. Le secret ? Choisir les bonnes escales.
De Desi à la grotte d’Antiparos : itinéraire d’une journée entre mythes et eaux cristallines
Première étape : Desi, cette île inhabitée où les chèvres règnent en maîtres sur des collines couvertes de thym et d’origanum dictamnus (l’« origan des dieux » des anciens Grecs). Les guides locaux racontent que les pirates y cachaient leur butin, et qu’un trésor dormirait encore dans une grotte près de la Plage de Livadi. Peu importe si c’est vrai : le vrai trésor, c’est l’eau turquoise qui clignote sous le soleil de midi, et les kedades (galettes de blé) que certains capitaines sortent de leur glacière avec un clin d’œil. À ne pas manquer : le phare abandonné de Strongyli, accessible après une randonnée de 20 minutes depuis le débarcadère. Les murs écaillés portent encore les graffitis des gardiens, des poèmes en katharevousa (grec puriste) datés des années 1930.
Puis vient Polyaigos, l’île la plus méconnue des Cyclades, où les falaises de marbre blanc plongent dans une mer si transparente que les pêcheurs l’appellent « le miroir de Poséidon ». Ici, pas de tavernes ni de transats : juste des plages comme Faros ou Kisiri, où le sable est si fin qu’il chante sous les pas. Les habitants d’Antiparos y viennent depuis des générations pour récolter des saligaria (escargots de mer) en avril, lors de la Panigiria (fête religieuse) de Saint-Georges. Le clou du spectacle ? La grotte d’Antiparos, avec ses stalactites en forme de draperies et ses inscriptions byzantines. Les grecs l’appellent « la cathédrale de la mer », et quand vous y entrez en barque à la lueur des lampes à huile, vous comprendrez pourquoi.
Ce guide repensé propose une approche moderne et visuelle de la Grèce, combinant sites emblématiques (Acropole, Météores, Delphes, Rhodes) et expériences authentiques au contact des habitants, avec des itinéraires adaptés à tous les budgets et saisons. Il offre une large gamme d’activités de plein air, notamment randonnée et sports nautiques, ainsi que des chapitres dédiés aux îles grecques et aux croisières pour une découverte complète du pays. Richement illustré et doté de cartes claires, ce guide synthétique permet de construire facilement son voyage tout en maximisant les expériences locales et les découvertes hors des sentiers battus.
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L’art délicat de sauter d’une île à l’autre : excursion vers Paros depuis Antiparos, entre ferries bondés et criques secrètes
Il est 7h45 sur le port d’Antiparos, et le soleil, encore timide, doré comme une paximadi (ces biscuits secs grecs qui accompagnent l’ouzo au petit-déjeuner), se reflète sur les flaques d’eau laissées par les vagues nocturnes. Les horaires des ferries vers Paros sont affichés à la main sur un tableau en bois élimé, entre les annonces pour les glendi (fêtes locales) et les offres de location de bateau privé. Le premier départ est à 8h—un vieux chalutier reconverti, le Agios Nikolaos, qui tangue déjà sous le poids des sacs de courses, des vélos et des touristes encore à moitié endormis. Pour 3,50€ l’aller simple (oui, vous avez bien lu), vous aurez droit à 20 minutes de traversée où l’odeur du diesel se mêle à celle du café grec servi dans des gobelets en plastique par un vieil homme qui ressemble étrangement à Zorba.
Une fois débarqué à Pounta, le port de Paros, deux options s’offrent à vous : soit vous vous précipitez vers les plages de Golden Beach (un spot de snorkeling réputé, où les fonds marins ressemblent à un aquarium géant), soit vous louez un scooter pour 15€ la journée et filez vers Lefkes, un village de montagne aux ruelles pavées de marbre, où les maisons blanches semblent avoir été empilées par un géant distrait. Ne manquez pas l’église Agia Triada, construite au 17ème siècle avec des pierres volées à un temple antique—les Grecs appellent ça du recyclage culturel. À midi, arrêtez-vous chez To Sipari pour déguster une mastelo (agneau cuit dans du vin et des herbes, servi avec des pommes de terre fondantes) en regardant les vieux pêcheurs jouer au tavli (backgammon) sous un olivier centenaire.
Le retour vers Antiparos se fait souvent en fin d’après-midi, quand la lumière devient dorée et que les ombres s’étirent comme des chats paresseux. Si vous avez le temps, faites un détour par Soros, une plage de sable fin où les locaux viennent pique-niquer avec des paniers remplis de dolmades (feuilles de vigne farcies) et de feta trempée dans l’huile d’olive. Les derniers ferries partent vers 22h, mais attention : en haute saison, ils sont souvent complets une heure avant. Pro tip : si vous ratez le dernier bateau, ne paniquez pas—les tavernes de Pounta servent des rakomelo (raki chaud au miel) jusqu’à minuit, et il y a toujours un pêcheur prêt à vous ramener pour 20€ et une bonne histoire.
Despotiko, l’île fantôme : croisières vers l’archéologie oubliée et plages où le temps s’arrête
À une dizaine de miles nautiques d’Antiparos se trouve Despotiko, une île déserte où les seuls habitants sont les chèvres sauvages, les lézards et les vestiges d’un sanctuaire apollinien du 6ème siècle av. J.-C. Les visites guidées (environ 40€ par personne, départ depuis Antiparos ou Paros) incluent généralement un arrêt au site archéologique, où les colonnes ioniques gisent comme des dominos géants, et une baignade sur la plage de Livadi, une étendue de sable blanc bordée d’eaux turquoise si transparentes que vous verrez vos orteils comme à travers une loupe. Les guides locaux, souvent des archéologues à la retraite, racontent que Despotiko était un lieu de pèlerinage pour les marins antiques—aujourd’hui, ce sont les touristes en quête d’Instagram qui y viennent en pèlerinage.
Les croisières vers Despotiko sont aussi l’occasion de découvrir une autre facette des Cyclades : celle des îles sans électricité, sans routes goudronnées, où l’on se déplace à pied ou en petit bateau à rame. Les agences comme Antiparos Boat Tours proposent des excursions avec pique-nique (prévoyez des tomato keftedes, ces boulettes de tomate frites, et du kopanisti, un fromage local épicé qui pique comme un reproche de belle-mère). Le clou du spectacle ? Le coucher de soleil depuis la pointe nord de l’île, où le ciel devient rose comme une loukoum (pâte de fruit grecque) et où l’on entend seulement le bruit des vagues et le cri des goélands.
Pour les plus aventureux, certaines excursions en catamaran (comptez 80-120€ avec repas) combinent Despotiko et les îles voisines comme Strongylo ou Tsimintiri, où les grottes marines abritent des colonies de phoques moines. Les skippers, souvent des anciens pêcheurs, connaissent les spots de plongée où l’on peut voir des épaves romaines ou des bancs de dentis (un poisson local qui ressemble à un mérou en costume de soirée). Évitez les mois de juillet et août si vous cherchez la solitude—même les îles désertes ont leurs high seasons.
Permis, tarifs et itinéraires : tout ce que vous devez savoir avant de louer un bateau privé à Antiparos
Louez un bateau à Antiparos, et vous comprendrez pourquoi les Grecs appellent la mer « la route bleue ». Mais attention : ici, pas de speedboat tape-à-l’œil comme à Mykonos. Les embarcations disponibles sont des petits bateaux en fibre de verre (5-6 mètres) ou des traditionnels kaïki en bois, parfaits pour une journée de pêche ou une excursion en famille. Les tarifs varient de 120€ à 250€ selon la taille et la saison, et oui, un permis bateau est obligatoire (les loueurs demandent généralement une copie avant de vous donner les clés—ou plutôt, le krikos, l’anneau en métal qui sert de clé ici).
Les itinéraires suggérés ? Un classique : Antiparos → Panteria (une crique accessible seulement par la mer, avec une grotte où l’eau est si froide qu’elle donne mal aux dents) → Diapori (une île minuscule où l’on peut camper sauvage, si on oublie les moustiques) → retour par Sifneiko, un restaurant de poisson grillé perché sur un rocher. Les locaux vous diront de faire gaffe aux meltemia, ces vents du nord qui peuvent transformer une balade tranquille en régate improvisée. Et si vous n’avez pas le permis, pas de panique : des skippers freelance (comme Yannis le Rouge, un ancien champion de planche à voile) proposent leurs services pour 50€ de l’heure—avec des histoires de naufrages et de sirènes en bonus.
« Un bateau sans vin, c’est comme une taverne sans bouzouki : ça flotte, mais ça n’a pas d’âme. »
— Nikos, 72 ans, loueur de bateaux à Antiparos depuis 1985
Snorkeling et plongée : où trouver les meilleurs spots autour d’Antiparos (et pourquoi les locaux ne vous y emmèneront pas)
Les fonds marins autour d’Antiparos sont un paradis pour le snorkeling et la plongée, mais les meilleurs spots ne sont pas sur Google Maps. Prenez Vathi, une baie en forme de fer à cheval où l’eau est si claire que vous verrez des astakos (langoustes) se cacher sous les rochers à 10 mètres de profondeur. Ou Kako Rema (« le mauvais courant »), une faille sous-marine où les courants créent un ballet de poissons multicolores. Les clubs de plongée comme Antiparos Diving Center proposent des excursions à 60€ avec équipement, mais les locaux vous diront de vous méfier des spongarades (oursins) et des gorgones (coraux rouges protégés—les amendes pour prélèvement illégal peuvent monter à 5 000€).
Pour une expérience plus haut de gamme, les excursions en catamaran avec repas (comme celles organisées par Sailing Antiparos) incluent souvent un arrêt près des récifs de Prasso, où les dauphins viennent parfois jouer dans le sillage du bateau. Les menus ? Du poulpe grillé mariné au vinaigre de figue, des faves (purée de pois cassés) et du vin blanc de Moraitis, un vignoble local. Et si vous avez de la chance, le capitaine sortira sa lyre et chantera des nisiotika (chansons des îles) en regardant le coucher de soleil teinter la mer en orange sang. Prévoyez un pull—le vent du soir mord comme une yayia (grand-mère) qui vous gronde pour être rentré tard.
Antiparos après la plage : artisanat, fêtes locales et l’art de traîner comme un Grec
Quand le soleil se couche, Antiparos se transforme. Les ruelles du village principal, Chora, s’animent avec les lumières des tavernes et le bruit des verres qui s’entrechoquent. C’est l’heure de l’aperitivo grec : un ouzo ou un mastiha (une liqueur à la résine de lentisque) accompagné de meze—des petits plats à partager comme des kolokithokeftedes (beignets de courgette) ou des sardeles pastes (sardines marinées). Les boutiques d’artisanat restent ouvertes tard, comme To Marmaro, où l’on vend des bijoux en obsidienne (une pierre volcanique locale) ou des poteries peintes à la main avec des motifs inspirés des fresques minoennes.
Si vous êtes là en août, ne manquez pas la Panigiri de la Vierge Marie (15 août), où toute l’île se retrouve pour danser le syrtaki jusqu’à l’aube, manger de l’agneau rôti à la broche et boire du vin retina (résiné, un goût qui divise—certains disent que ça goût le « désinfectant poétique »). Les fêtes locales, appelées glendi, sont l’occasion de voir les anciens jouer de la lyra et les jeunes faire des concours de plate smashing (oui, casser des assiettes, c’est une tradition ici). Et si vous voulez vraiment vous intégrer, apprenez à dire « Stin ygeia mas ! » (« À notre santé ! ») avant de trinquer—les Grecs adorent les étrangers qui font l’effort.
Le secret le mieux gardé : les excursions en catamaran au coucher de soleil (et pourquoi ça vaut chaque centime)
Il y a des excursions en catamaran, et puis il y a celles-ci. Imaginez : un bateau spacieux, des coussins moelleux, un équipage qui sert des dakos (salade crétoise à base de biscuit d’orge) et du rosé local glacé. Les options avec repas (comme celle proposée par Blue Sailing) coûtent entre 90€ et 150€, mais incluent un festin de fruits de mer, des arrêts pour nager dans des grottes bleues (comme celle de Kamari, où la lumière filtre à travers les rochers comme dans une cathédrale), et un coucher de soleil observé depuis le pont, avec des couvertures en laine pour les soirées fraîches. Les skippers, souvent des marins aguerris, racontent des légendes comme celle de la Neraïda (une nymphe des eaux) qui hanterait les récifs de Psaraliki.
Ce qui rend ces excursions magiques, c’est leur rythme. Pas de précipitation, pas d’horaire à respecter—juste le clapotis de l’eau, le goût du sel sur les lèvres et la sensation d’être, l’espace de quelques heures, un peu grec. Et si vous avez la chance de croiser un groupe de pêcheurs rentrant avec leur prise, ils vous offriront peut-être un kavas (un verre de tsipouro maison) en échange d’une histoire de votre pays. Parce qu’ici, plus que les paysages, ce sont les rencontres qui vous feront revenir.
Antiparos, ou comment se perdre (volontairement) dans une île où le temps s’étire comme de la paximadi au soleil
Il y a des endroits où l’on débarque en pensant y rester quelques jours, et où l’on se surprend, trois semaines plus tard, à discuter politique avec un pêcheur tout en épluchant des faves (ces petites fèves jaunes, stars des tables antipariotes) sur une terrasse en bois branlante. Antiparos est de ceux-là. Cette île des Cyclades, souvent reléguée au rôle de petite sœur d’Paros (à cinq minutes en ferry, un trajet qui coûte moins cher qu’un café frais à Mykonos), est un paradoxe ambulant : à la fois ultra-touristique l’été et profondément préservée, capable d’offrir des plages désertes en plein août si vous savez où chercher. Ici, les glentadia (ces clochettes en laine tressée que les bergers accrochaient autrefois aux cous des chèvres) se vendent encore au marché aux puces de Chora, entre les étals de san Michalis (un fromage de chèvre affiné dans du vin rouge) et les paniers en osier tissés par les dernières artisanes de l’île.
Prenez la route qui serpente vers le sud, vers Soros ou Agios Georgios, et vous comprendrez pourquoi les habitants parlent de leur île comme d’une « femme capricieuse ». Les paysages changent brutalement : des collines pelées, balayées par le meltemi, cèdent la place à des vallons verdoyants où poussent des kapari (câpres sauvages) récoltés chaque printemps par des familles entières. En mai, lors de la Panigiria (fête religieuse) de Profitis Ilias, les villageois montent à pied jusqu’à la chapelle blanche perchée sur la colline, portant des plats de sofrito (viande marinée à l’ail et au vinaigre) et des bouteilles de raki maison. Le lendemain, les bancs de l’église sont recouverts de nappes à carreaux, et l’on y sert un repas communautaire où les koulouria (biscuits en forme d’anneau) se partagent entre inconnus. C’est ce genre de détails qui fait d’Antiparos bien plus qu’une destination : une leçon de philoxenia (l’hospitalité grecque), où l’on vous tutoyera avant même de connaître votre nom.
Pourtant, ne vous y trompez pas : Antiparos n’est pas un musée à ciel ouvert. Les jeunes de l’île, nombreux à étudier à Athènes ou à l’étranger, reviennent l’été avec des idées plein la tête. Certains, comme Yannis Moraitis (un potier dont l’atelier, près de Kambos, sent la terre humide et le thym), mélangent traditions et modernité en créant des céramiques inspirées des motifs cycladiques… mais en y ajoutant des touches de street art. D’autres, comme les frères qui tiennent la taverne « To Steki » à Psaralyki, réinventent les classiques : leur lobster pasta (un péché mignon local) est servi avec une sauce au masticha (résine de lentisque), et leur carte des vins met en avant des domaines bio de Santorin plutôt que les habituels retsina industriels. Même les voiliers qui accostent dans la baie de Despotiko (l’île inhabitée voisine, où l’on trouve des ruines d’un sanctuaire apollinien) transportent désormais des éco-touristes venus étudier les posidonia (herbiers marins protégés) plutôt que des fêtards en quête d’Instagram.
Alors, comment vraiment explorer Antiparos ? En louant un vélo rouillé chez Miltos (le seul loueur qui vous donnera une carte manuscrite avec les « vrais » chemins de chèvres) pour traverser l’île jusqu’à la cave d’Antiparos, cette grotte aux stalactites géantes où, selon la légende, le pirate Barbarossa aurait caché son butin. En s’arrêtant chez Tassos, le dernier fabricant de floka (ces sandales en cuir brut que portaient les paysans), pour lui acheter une paire avant de piquer une tête à Panagia, une crique accessible seulement à pied (ou en 4×4, si vous osez braver les ornères). En goûtant le melopita (une tarte au miel et au fromage) chez « To Kyma », une cantine de plage tenue par une grand-mère qui vous engueulera si vous ne finissez pas votre assiette. Bref, en acceptant que le meilleur itinéraire soit souvent celui que l’on ne trouve pas dans les guides. D’ailleurs, parlons-en des itinéraires…
Pour ceux qui veulent structurer (un peu) leur errance, voici quelques pistes testées et approuvées :
